Συνέντευξη της προέδρου της "Κοινωνικής Συμφωνίας" Λούκας Τ. Κατσέλη στην γαλλική εφημερίδα "L' Humanite" με τον δημοσιογράφο Fabien Perrier.

Grèce: "ERT donne une excuse à Samaras pour convoquer des élections"

Ancienne du Pasok, Louka Katselli décrypte le jeu politique derrière la décision du gouvernement de fermer le groupe audiovisuel grec public. "A mon avis, le premier ministre Samaras cherche un prétexte pour des élections car en septembre, la situation politique ne lui sera plus favorable avec la montée de Syriza."

Désormais, les jours se suivent et semblent se ressembler, en Grèce. Malgré l’injonction du Conseil d’Etat à rouvrir ERT, l’écran des télévisions publiques reste noir et les ondes silencieuses. Chaque jour, les trois chefs de parti se réunissent, et campent sur leur décision. Chaque soir, ils annoncent que la rencontre fut vaine, qu’aucun accord n’a été trouvé. Mascarade politique car aucun ne veut porter la responsabilité d’avoir provoqué des élections anticipées quand la troïka fait pression pour poursuivre les politiques d’ajustement structurel et quand Syriza, la gauche, arrive en tête des sondages? Possible. Mais si les jours se ressemblent, c’est aussi parce qu’ils révèlent toujours un peu plus à quel point la rupture, au sein de la coalition gouvernementale, semble consommée. Si les partenaires trouvent un accord sur ERT, ils ne font que repousser la crise menant, fort probablement, à l’éclatement. Et si le piège s’était refermé sur ceux qui l’ont tendu?

Dimar et Pasok sur le gril

La pression monte. Dimar, le parti de centre gauche, tente de se sauver alors qu’il est en chute libre dans les sondages. Il annoncera ce vendredi s’il compte rester dans le gouvernement. Le groupe du Pasok, lui, est convoqué en urgence. Chaque jour augmente la dose d’incertitude en Grèce.

Louka Katselli a été ministre à deux reprises sous le gouvernement de Giorgos Papandreou. En désaccord avec la politique menée, elle a quitté le gouvernement et démissionné du Pasok, avant de créer sa formation politique. Elle livre à l’Humanite.fr son analyse de la crise que traverse le pays avec « l’affaire ERT ».

Comment expliquez-vous la fermeture de ERT ?

Louka Katselli. C’est une décision sans précédente qui sape un droit élémentaire à une information publique indépendante. C’est particulièrement vrai en Grèce car ERT fournissait des services d’information à des îles qui n’avaient accès à un aucun autre service d’informations. Le groupe audiovisuel public fournissait aussi un service culturel et éducatif pour les Grecs à l’étranger. Or, la diaspora grecque est importante dans de nombreux pays. En outre, ERT servait de réseau pour l’armée et pour la défense nationale. Elle avait aussi un rôle éducatif. Fermer ERT est donc un coup porté à la démocratie. Pour justifier sa décision, le gouvernement a usé de l'argument des coûts, du gaspillage et de la mauvaise gestion d'ERT, de la nécessité de restructurer la compagnie. Même si certaines de ces accusations ne sont pas totalement fausses, il y a toujours un espace pour réorganiser une société et pour améliorer son management plutôt que de la fermer!

Pourquoi, alors, ont-ils pris cette décision ?

Louka Katselli. Pour plusieurs raisons:

1.  Le gouvernement voulait montrer qu’il était en capacité de prendre des mesures «difficiles» et de licencier en une seule nuit 2500 salariés, ce qu’ils avaient pour objectif de faire mais qu’ils ne voulaient pas faire en cherchant dans différents ministères. D’ailleurs, ils s’étaient mis d’accord avec la troïka et la Commission européenne sur le fait qu’ils licencieraient. Dans ces conditions, ERT était le parfait candidat, spécialement parce que cela convenait au ministre en charge du dossier.

2.  En fermant ERT, et en créant une compagnie semi-publique et, de ce que nous savons, de nombreux services seront privatisés, le gouvernement offre un énorme cadeau aux intérêts privés du secteur de l’information, secteur privé qui est aussi frappé par la récession profonde et la crise économique grecque, qui est à la recherche de nouveaux services et qu’ils obtiendront par cette forme étrange de privatisation du service public de l’information.

3.  ERT a un certain nombre d’actifs qui ont été transférés au ministère de l’économie, en une seule nuit, celle du 11 juin! Je ne serais pas surprise qu’ils soient ensuite transférés au fonds de privatisation pour être vendus.

4.  ERT est la seule société qui a une licence officielle pour diffuser. Donner une licence à une compagnie privée a toujours été utilisé comme une ruse politique pour garder l’information sous son contrôle. Avec cette forme d’abrogation de la seule licence de ERT qui lui assurait son indépendance, toute l’information devient plus regroupée autour de sociétés plus vulnérables à la propagande et contrôlée par une partie du gouvernement.

5.  Enfin, si les deux autres partis qui soutiennent ce gouvernement n’acceptent pas cette mesure anticonstitutionnelle, alors le premier ministre Samaras pourra convoquer des élections. Je crois que c’est pour ça qu’il a pris cette décision, comme un prétexte pour convoquer des élections. Car il sait qu’en septembre, la situation se sera détériorée. Après son congrès, Syriza sera dans une nouvelle dynamique. Avec ERT, Samaras s'offre là une bonne occasion de convoquer des élections, probablement en juillet et de prendre tout le monde par surprise. Voilà pourquoi il veut mettre en œuvre un agenda de réformes spécialement envers une société qui a été diffamée depuis longtemps, qui connaît de vrais problèmes, mais qui pourraient être résolus d’une autre façon.

 

Et la décision de fermer ERT est anticonstitutionnelle…

Louka Katselli. Oui! Le Président de la République n’aurait jamais dû la signer. Il aurait fallu que tous les ministres concernés signent ce décret pour qu’il soit valable; or, celui de la Justice et celui de l’Intérieur ne l’ont pas signé. Le Président a signé sans l’accord de deux ministres, c’est anticonstitutionnel. Ensuite, le Pasok, qui est un élément essentiel de la coalition, a dit qu’il ne soutenait pas cet acte législatif. Quand le décret a été signé, le gouvernement n’avait donc pas les preuves de détenir la majorité au sein du Parlement.

 

S’il y a des élections, cette affaire autour de ERT est-elle un moyen de « casser » la campagne électorale?

Louka Katselli. Oui. C’est une excuse de Monsieur Samaras pour appeler à des élections mais aussi, quand, le dimanche précédent, il a averti le Pasok et Dimar, tous les deux ont dit qu’ils étaient contre cette décision. C’est la raison pour laquelle ils n’ont pas signé le décret. Malgré leur opposition, il a demandé la fermeture par décret. Il a forcé leurs mains. Ainsi, il a l’excuse qu’il a besoin d’élections. A mon avis, nous sommes dans un jeu politique car ni Monsieur Venizelos (Pasok), ni Monsieur Kouvelis (Gauche démocrate) ne veulent donner l’impression qu’ils sont responsables des élections anticipées. Personne ne veut prendre la responsabilité de provoquer les élections. A mon avis, Monsieur Samaras cherche un prétexte pour des élections. Celui invoqué est la « réforme » d’une société. Mais dans les faits, il a agi de cette façon afin de restreindre les procédures démocratiques et la liberté d’information.